Le cygne (1963)
Nicolas Mavrikakis et et Yan Romanesky - 18 janvier 2018

Le cygne (1963) - Hans Schleeh

Crédit photo : Caroline Bergeron

 

En art, il existe deux catégories d’abstraction. D’une part, il y a ce que l’on nomme l’art non objectif, terme qui désigne des œuvres où il n’y a aucune référence visuelle à la nature qui nous entoure. Dans ce type d’art, le but de l’artiste est de s’exprimer à travers des moyens spécifiquement plastiques comme la couleur, les lignes, les textures, et avec des volumes dans le cas de la sculpture... D’autre part, il y a un art de l’abstraction où l’artiste se réfère encore à la nature, mais où il extrait du réel les éléments qui lui semblent essentiels, en laissant tomber tous les détails qui lui semblent superflus.

 

L’œuvre intitulée Le cygne, de l’artiste Hans Schleeh, doit être classée dans cette deuxième catégorie d’abstraction. Dans sa sculpture, nous pouvons reconnaître certains éléments du corps de l’animal (ailes, bec, queue), mais l’artiste a fait abstraction d’autres éléments tels que les plumes, les yeux, les pattes… Il en résulte une simplification des formes, une représentation qui souligne l’aspect aérien de l’animal, les formes arrondies évoquant les ailes en déploiement de l’oiseau. À l’été 1964, dans la revue Vie des arts, le critique et écrivain Jacques Folch-Ribas décrivait cette œuvre par ses « formes pures qui donnent au marbre une légèreté de ballerine ». En effet, malgré son poids d’une tonne et demi, l’artiste a su insuffler une grâce certaine à son œuvre.

 

« [Des] formes pures qui donnent au marbre une légèreté de ballerine ».

 

Arrivé d’Allemagne au Québec en 1951, Hans Schleeh exposa dans les célèbres galeries Agnès-Lefort et Dominion à Montréal dans les années 1950 et 1960. Jean Sarrazin, dans La Presse en octobre 1960 voit déjà dans son travail des « formes émergeant de la matière, moulées par le désir de mouvement, de sentiments […]». Schleeh reçut à cette époque plusieurs commandes pour des espaces publics : le pavillon central de l’Université de Sherbrooke (1965), la Place Upper Trafalgar (Affinités, 1967), la Plaza Côte-des-Neiges (Trialogue, 1968) à Montréal. Ces deux dernières œuvres, tout comme Le cygne, furent commandées et offertes par des entreprises de gestion immobilière. La sculpture Le cygne avait été commandée pour servir de pendant à une œuvre en acajou de la sculpteure Anne Kahane (elle aussi placée à la salle Wilfrid-Pelletier).

 

Il faut voir dans cette commande et dans ce don une preuve que, dans les années 1960, de plus en plus de compagnies désiraient s’impliquer dans la vie culturelle du Québec en devenant mécènes. Dans le cahier spécial du journal Le Devoir publié le 20 septembre 1963 en l’honneur de l’ouverture de la Place des arts, on peut lire que « Les dirigeants de la compagnie [ayant offert Le cygne] comptent que leur geste sera imité par d’autres importantes entreprises commerciales en vue d’aider au développement des arts à Montréal ».

 

Le cygne (1963)
Hans Schleeh (1928-2001)
Don de la société immobilière Concordia Estates Limited

Salle Wilfrid-Pelletier

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