arts urbains
Crédit photo : Do Phan Hoi
Crédit photo : Phan Hoi Do
Pascaline David - 25 avril 2019

Arts urbains : entre respect, discipline et persévérance

Qu’ils soient danseurs, rappeurs ou beatmakers, les émissaires de la culture hip-hop s’entendent sur une chose : l’art leur permet de s’exprimer et de se rassembler. C’est le cas lors d’événements comme le Block Party organisé dans le cadre du projet Dramatik – Au rythme des mots, du Programme éducatif de la Place des Arts.

 

Le danseur et organisateur du projet Pierre-Michel Jean-Louis, alias Afternoon, a souhaité recréer le contexte d’un block party, ces fêtes de quartier new-yorkaises d’où a émergé la culture hip-hop. Son objectif ? Mettre en valeur les talents locaux et initier les plus jeunes à la multitude de styles qui existent en arts urbains.

 

Au quotidien, ces arts sont bien souvent des vecteurs d’expression et de tolérance pour ceux qui les pratiquent. « Dans un événement de danse où toutes les cultures et les religions sont mélangées, personne ne se juge, tout le monde est dans la même vibe », estime Victor Sono, alias Vicious du groupe Sweet Technique, qui pratique le break depuis plus de vingt ans. « On se serre la main après les performances, il y a toujours du respect entre nous. »

 

C’est avec l’un de ses amis qu’il a découvert le break à la fin des années 1990. Les deux jeunes se mettaient mutuellement au défi de réussir les mouvements. « À l’époque, on n’avait pas Internet, on progressait grâce aux amis, aux cassettes, puis on allait s’exercer au parc », raconte le danseur de 32 ans. 

 

Vivre (de) son art

 

Aujourd’hui, Victor Sono s’exerce consciencieusement et régulièrement dans des studios montréalais ou dans des lieux publics. Il participe même à des compétitions internationales. « La danse m’a apporté beaucoup de confiance. Ça a pas mal changé ma vie, confie-t-il. J’ai réalisé que si je pouvais accomplir tant de choses dans le break, je le pouvais dans d’autres domaines aussi. » 

 

S’il arrive à vivre de sa passion, ce n’est pas le cas de tous ceux qui pratiquent les arts urbains. « La musique ne paie pas les factures », lance la chanteuse et danseuse Karina-Talia Olimpo, qui travaille à temps plein dans un magasin de fournitures de bureau. Mais dès qu’elle a du temps libre, l’artiste de 21 ans prend la plume, enregistre ses chansons dans un studio professionnel ou sort danser le freestyle en club.

 

Ayant grandi à Mascouche, Karina-Talia était bien souvent la seule anglophone du groupe. C’est ce qui l’a menée à se plonger dans l’art. « C’est devenu une façon d’interagir, car chacun peut s’identifier aux émotions de l’autre à travers la musique », soutient-elle.

 

C’est également la vision du rappeur Delroy, de son vrai nom Guillaume Martin-Couture, pour qui les rimes sont un véritable exutoire. « J’ai toujours été solitaire et renfermé, dit le musicien de 22 ans. Je vis beaucoup d’émotions, mais je ne les montre pas. Ce sont mes chansons qui me permettent de les exprimer. » 

 

Ce perfectionniste, qui compose des pièces dans sa tête sans même les écrire, enregistre ensuite ses créations dans l’intimité de son appartement. « J’ai déjà donné quelques spectacles, mais je me concentre actuellement sur la création pour développer une identité musicale solide », précise-t-il.

 

S’il aime travailler en solo, Delroy apprécie le sentiment de communauté qui se déploie à travers l’art urbain et la possibilité de bâtir des relations musicales avec d’autres artistes. 

 

Tremplin virtuel

 

Ces relations se nouent notamment sur Internet, car nombreux sont ceux qui utilisent les réseaux sociaux comme vitrines artistiques. Sur Instagram, Karina-Talia Olimpo publie ainsi des vidéos où elle interprète ses chansons.

 

« Le talent c’est bien, mais il faut aussi de la persévérance et de la chance, lance-t-elle. Je continue à proposer du contenu de plus en plus poussé à mon public, en espérant que quelqu’un [dans l’industrie musicale] remarque mon travail et m’offre un contrat. » 

 

La jeune artiste a d’ailleurs déjà été repérée sur Instagram par le producteur Anthony Bailey, avec qui elle a enregistré une chanson.

 

De l’importance des rencontres

 

La scène, les festivals et autres lieux de rassemblement physique demeurent toutefois essentiels. « C’est le meilleur endroit pour que les gens t’écoutent vraiment, affirme la chanteuse. Quand tu livres une performance live, ils peuvent mieux comprendre ce que tu fais. S’ils sont conquis, ils vont te suivre sur les réseaux sociaux. » 

 

Un soutien que donne aussi la communauté artistique elle-même. Avec son groupe, Victor Sono organise des événements comme le festival Skillz-O-Meter, un week-end annuel de battle entre les meilleurs danseurs urbains au monde. La compétition réunit du même coup le microcosme montréalais dans le domaine.

 

« Il y a un aspect très familial en danse urbaine, puisque chacun a tendance à vouloir aider les plus jeunes », affirme Victor Sono.

 

Cette générosité se matérialisera au rythme des mots et des pas lors du Block Party qui aura lieu les 3 et 4 mai, à la Place des Arts.

Credit photo : Do Phan Hoi

 

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